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Agir pour ne pas s’effondrer


Deuxième volet du reportage sur la Ferme Légère (voir le premier ici). 


L’effondrement n’était pas au départ dans l’ADN de la Ferme Légère. L’envie était de vivre la décroissance et de montrer ce choix comme porteur d’une existence plus enviable que celles que beaucoup subissent en ville. L’idée de l’effondrement est arrivée un peu plus tard avec le livre de Pablo Servigne et Raphaël Stevens, Comment tout peut s’effondrer. Cet impensé s’invite alors dans les discussions autour de la table. Et au printemps 2018, Valérie, cofondatrice de l’écolieu, son fils Noé et Marc décident de profiter d’un voyage à vélo pour étudier comment les autres citoyens se sentent par rapport au sujet de l’effondrement : le connaissent- ils ? Comment y réagissent-ils ? S’appuyant sur les réseaux militants pour programmer des rencontres sur le sujet, ils se lancent dans un périple de 2500 km à bord de leurs vélos en bois auto-construits. 

De leur village de Méracq jusqu’à la région parisienne et retour, ils rencontrent quelque cinq cents « sympathisants écologiques » au cours de leurs 21 animations. Des échanges riches, des participants plutôt contents d’avoir partagé des idées, des ressentis, mais peu de solutions à l’horizon... Une évidence cependant émerge, celle de l’échec de la transition écologique qui permettrait de rendre notre société éco-compatible : « Depuis cinquante ans que les écologistes se battent, les choses n’ont fait qu’empirer ! »

Apprendre et transmettre l'autonomie

Cette aventure, relatée dans un livre qu’ils ont publié en décembre 2020 (voir Aller + loin, ci-dessous), les a confortés dans les choix de la Ferme Légère qui, loin d’ignorer les luttes globales, cultivent aussi un art de vivre à une échelle plus modeste. « Avant le covid, j’aurais qualifié notre mode d’existence d’“exercice de style”. Mais maintenant la recherche d’autonomie m’apparaît comme une urgence. »

Pour la première fois cette année, l’association La Ferme Légère a décidé de s’endetter pour finir le chantier de l’autonomie en eau qui permettra de produire davantage de légumes et de légumineuses. Le site ne se prête pas à la culture de céréales, mais la ferme met en place une cartographie des ressources et des savoirs locaux et fonctionne en réseau sur un territoire que l’on peut parcourir à vélo.

Pour les membres de l’association, c’est clair : l’autonomie n’est pas l’autarcie. La décision a d’ailleurs été prise de transmettre tout ce que la Ferme a acquis de savoir-faire et de savoir-être en proposant des journées de formation. Leurs sessions « Résidence décoiffante » consistent en quatre jours d’immersion et de réflexion afin de mettre en cohérence sa vie et ses valeurs. Plusieurs stages proposent également des bases pour penser autonomie énergétique et auto-écoconstruction. « Nous pensons qu’il faut créer des espaces de résilience, préserver de l’humanité et de la dignité au sein de la tourmente, accueillir tous ceux qui voudront bien nous rejoindre. Ce sont des objectifs certes plus modestes que ceux de la transition de l’ensemble de la société mais ils sont à notre mesure. » Un défi à hauteur de collectif qui se cultive à la lisière du système économique, dans la nature, là où la vie est la plus riche.


Chiffres & fonctionnement

Habitation

Maison du 18e agrandie et auto-rénovée : verrière bioclimatique au sud, isolation par l’extérieur au nord en ouate de cellulose pour les murs et en laine de bois pour le toit.

Toilettes sèches à l’extérieur.

Récupération de l’eau de pluie – Consommation de 30 litres par jour et par personne.

Phyto-épuration.


Énergie

6 m2 de panneaux solaires pour la production d’eau chaude solaire. La température varie de 40°C l’hiver (grâce au complément de chauffe du poêle dragon) à 80-90°C l’été.

Bois issu des arbres morts de la ferme : 4 stères par an pour alimenter le dragon (rocket stove, poêle de masse), le four à pain (1 fois/semaine) et la boisinière toute l’année, par beau temps.

Four solaire, dès que c’est possible.

22 m2 de panneaux solaires et batteries pour internet, la lumière, le lave-linge, les plaques de cuisson et même la bouilloire électrique. Ces dernières ne peuvent être utilisées que lorsque la production est perdue car les batteries sont chargées à bloc.

Le contrat Enercoop a été résilié au printemps 2019.


Alimentation

Production sur la ferme : légumes (75%), œufs, miel, pain (la farine est achetée localement), viandes issues de la ferme (bélier, poulet, agneaux broutards mâles). Production maraîchères limitées par la quantité d’eau disponible, de l’ordre d’1 m3/j en été.

Achat groupé pour les légumineuses, les céréales, l’huile et les autres graines (tournesol, noisette). Détours par la Biocoop de temps en temps.

Participation de 30 euros par personnes et par semaine.


Transports

Une voiture partagée. Chacun paie en fonction du nombre de kilomètres parcourus.

Des vélos à disposition.

Train et bus à une vingtaine de kilomètres.


Structuration

Une SCI avec deux associés aujourd’hui, qui gère et finance les travaux dans la maison (achat des matériaux).

Une association qui loue à la SCI, et qui gère les extérieurs et la vie quotidienne.

Projet d’ouverture du lieu à l’habitat léger, moins communautaire que la colocation.

Une réunion hebdomadaire qui permet de discuter des décisions à prendre, des projets en cours, des arrivées et départs. Une réunion “Emo” (émotionnelle) toutes les 3 semaines au minimum.


Bénévolat, investissement

Celles et ceux qui résident à la ferme donnent 19 heures de leur temps par semaine pour la gestion du lieu. Chacun à son tour fait la cuisine et les autres tâches quotidiennes pour le groupe durant une journée, et chacun est référent de plusieurs activités : s’occuper du poulailler, des animaux et des pâtures, du pain, de la production maraîchère, des ruches, des travaux divers, de la cuisine, du ménage dans les parties communes, de l’accueil des visiteurs…

Aller + loin

- Le site de la Ferme Légère

-  Un aller pour la Terre, diaporama sonore de Clément Osé, sur l’effondrement et son installation à la Ferme Légère. À voir sur le Mag.

- Voyages en effondrement, Valérie Garcia et Marc Pleysier, éditions Utopia/Passerelle éco, 2020.

- L’étude sur l’effondrement menée par Valérie Garcia et Marc Pleysier.

- La Ferme Légère dans Passerelle Eco n°74.


Crédits photos : ©Clément Osé


La série “Tour de France des écolieux”, en libre accès, est produite par Colibris le Mag, en partenariat avec l’Agence de la Transition Écologique (ADEME).

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