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Chronique Le Jardin sans pétrole #5

Les anciennes variétés de semences ont une histoire bien vivante


Jardiner dans la grande ville ? Difficile. Alors, Christine s’échappe toutes les fins de semaine, pour maraîcher et observer la nature. Médiatrice, écrivaine et journaliste, Christine écrit et expérimente autour des plantes, des jardins et de l’écologie, à Reporterre, où elle tient la chronique hebdomadaire du "Jardin sans pétrole" depuis cinq ans, mais aussi pour les éditions Belin, avec "L’herbier Vilmorin" (2015).



Des graines de tomate qu’il faut encore vanner

En cette saison, le Jardin sans pétrole n’a guère besoin de l’aide du jardinier. Qui occupe son temps à inventorier ses besoins en graines pour le temps à venir.

Que d’eau, que d’eau ! Je ne suis pas capable de dire combien de centimètres de pluie sont tombés car le pluviomètre a débordé. En cette saison où, dans un sol plus lourd, on pourrait craindre pour les racines des plantes vivaces, nous ne risquons pas grand-chose. Pente douce et terre sablo-limoneuse drainent l’eau vers la forêt. Les feuilles ont ce qu’il faut d’humidité pour se décomposer… À cette saison, aller au jardin est un prétexte pour se promener, prendre un bol d’air dans les bois, admirer les hellébores et les clématites en fleurs, rendre visite aux chevaux, car le jardinier est plus utile à la maison. La lumière qui revient doucement l’appelle à mettre de l’ordre dans les graines, voir ce dont il dispose et ce qu’il pourrait échanger ou acheter.

À la maison, j’utilise une petite vitrine en bois, chinée sur un trottoir, pour ranger les précieuses semences et le petit matériel de jardinage que nous ne laissons pas au jardin. Les graines récoltées y sèchent dans des coupelles mais, le temps passant et préjugeant d’une infaillible mémoire que je ne possède pas, je me trouve parfois devant une coupelle de graines dont le nom de la variété m’échappe ! À d’autres, j’ai donné un nom bien à moi lié à l’histoire qui les a conduites dans ma collection, comme la « tomate ronde jaune de Jean » dont les graines ont été recueillies sur une divine tomate de l’Amap, ou bien les petites tomates cerises dites « de Notre-Dame-des-Landes », offertes par un maraîcher venu proposer ses légumes dans le bocage lors de la manifestation des bâtons. J’imagine que c’est ainsi que les noms vernaculaires des variétés de plantes potagères sont arrivés jusqu’à nous. Et que les variétés se sont multipliées, se dotant de caractères différents selon la sélection que chacun en fait ou des croisements parfois heureux que les insectes pollinisateurs provoquent à leur insu lors de leurs tournées gastronomiques.

S’adapter au climat et au sol

Ainsi, les variétés anciennes n’ont d’ancestral que le nom — certaines ont plusieurs noms — car leur culture année après année par des jardiniers têtus les a fait voyager dans le temps jusqu’à nous, faisant évoluer leur patrimoine génétique pour s’adapter notamment au climat, mais aussi au sol du lieu où elles ont été semées. Récolter les graines de ses propres plantes permet ainsi de les adapter à son propre jardin et, plus les plantes d’origine sont rustiques, issues de variétés dites de « population » dans lesquelles le patrimoine génétique de chaque graine est différent, plus l’adaptation est facilitée pour aujourd’hui et pour demain.

J’ai rangé dans une boite à chaussures toutes les graines, classées par famille : soixante-trois petits sachets, dont huit sont remplis de mes récoltes.

Les graines classées par famille.

Crédit Photo : Christine Laurent / Reporterre

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